Bonjour,
Merci pour ta réponse. Et avant tout, je tiens à préciser que j'apprécie cette discussion avec échange de nos arguments respectifs.
anaigaon a écrit :
"J'ai peut-être mal compris... Tu t'interrogeais, pourtant, sur la façon dont avait étée reçue la musique canonique de JSB.
Et moi je demandais, reçue par qui, ceux qui analysent, ou ceux qui écoutent "naïvement" ? Quand on entend aujourd'hui ceux qui n'aiment pas le contemporain, ils disent qu'ils n'aiment pas l'écouter, très rarement ils parlent de construction. Ceux qui ont écouté, et peut-être aimé le canon de Bach, ils n'ont pas non plus été concernés par sa complexite sous-jacente. Dans les deux cas, seuls les théoriciens ou compositeurs s'intéressent à ce dernier aspect."
Initialement, je répondais à Patrick qui avait écrit :
Citation :
Qui de Dufourt ou de Murail fut le premier à utiliser l’expression “ musique spectrale ”, afin de décrire une musique fondée sur l’analyse
scientifique du son musical ? + Triple canon à 6 voix de JSB, lecture à l'endroit et à l'envers, etc. Et la place de la sensualité dans tout cela ? Autrement dit : n'est-ce pas un peu cérébral ?"
, et c'est pour cette raison que j'avais cité Bach, pour montrer qu'il n'y avait pas que les compositeurs contemporains qui pouvaient-être "cérébraux". Et effectivement, je posais la question de la réception de l'oeuvre à cette époque. Car si aujourd'hui nous pouvons la juger facile d'accès, était-ce le cas du vivant de JS Bach auprès du petit public naissant de la bourgeoisie, en dehors des "privilégiés culturels" des cours princières ?
Il faut quand même reconnaître que faire un canon, surtout complexe, qui "sonne", c'est dur, beaucoup plus dur qu'un canon qui dissonne de bout en bout
C'est ton avis. Mais quand j'écoute Schoenberg et Berg, notamment, sans parler de Dutilleux, mais aussi Boulez, Ligeti, etc, je n'ai pas le sentiment que leur art contrapuntique soit si facile que ça. Et concernant Berg, il y a ce livre de Jean_Paul Olive, Alban Berg : le tissage et le sens chez Harmattan : http://www.priceminister.com/offer/buy/ ... Livre.html qui donne le vertige sur sa façon de construire ses contrepoints.
En fin de compte nous semblons, à première vue, être d'accord sur ces deux constatations :
- les deux musiques sont construites rationnellement ;
- leur écoute non avertie est perçue très différemment.
Mais nous divergeons malgré tout, parce que toi tu sembles trouver important le premier tiret, alors que pour moi le second montre que ce point commun (construction pensée) n'est qu'une apparence. Je comparerais cette situation à un raisonnement par l'absurde : un raisonnement qui aboutit à un résultat faux contient nécessairement une faille, il est donc un peu vain de le rapprocher d'un raisonnement aboutissant à un résultat juste.
"Apparence" ? J'ai un peu du mal à te suivre dans ton raisonnement. Car c'est bien au-delà de l'apparence concernant la construction chez Bach, elle est bien réelle et elle le distingue à son époque des autres compositeurs.
Et puis cette histoire de maths en musique, je ne pense pas qu'il faille mettre ça trop en avant, car, entre nous soit dit, ce sont quand même des maths très élémentaires (classes d'équivalence modulo 12 et autres plaisanteries de terminale au maximum). Chacun peut trouver une stimulation dans toutes sortes de "trucs" pour composer, mais de là à monter ça en épingle pour en faire une théorie, je suis assez peu client.
C'est une présentation un peu réductrice de la Set Theory, non ? Tu écris monter ça en épingle pour en faire une théorie, je veux bien mais te laisses à ton affirmation. Car comment comprendre pourquoi les chercheurs/compositeurs, notamment américains - mais les français s'y mettent très sérieusement - y consacrent une grande partie de leur énergie, de Milton Babbit en passant par Allen Forte, Georges Perle, David Lewin, John Rahn ? Puis-je me permettre de t'indiquer que ce sont des chercheurs/musicologues/compositeurs reconnus par la communauté musicale.
Mais bon, si c'est celà qui est monté en épingle... De même, pourquoi l'Ircam et ses chercheurs ont implémenté dans Open Music de façon native une librairie spécialisée MathTools les outils de la Set Theory, tant pour l'analyse que la composition si c'était si anodin ou du niveau de terminale ? Pour s'en faire une idée un peu moins caricaturale, voici un PDF de Moreno Andreatta chercheur à l'Ircam et au CNRS et de Marc Chemillier de l'Université de Caen qui présentent tous deux quelques aspects théoriques du cours qu'ils donnent dans le cadre du Master ATIAM (Acoustique, Traitement du signal et Informatique appliqués à la Musique) de l'Ircam. Avec entre autres, une présentation de la Set Theory d'Allen Forte et la transformational Theory de David Lewin : http://www.grame.fr/jim07/download/15-Andreatta.pdf
[/quote]Je parle des compositeurs, pas de toi, puisqu'effectivement cela peut-être amusant et passionnant de chercher comment ils ont fait. Mais de toute façon, la motivation pour chercher, elle vient de la rencontre avec une oeuvre qui plaît (ou intéresse musicalement), c'est quand même ça le point de départ, il me semble. Pour finir en pondérant mon propos : je t'avoue que ce canon du sieur Bach, je le trouve mignon, sans plus (aucune tension). N'importe quelle fugue de L'Art de la fugue est beaucoup plus intéressante musicalement, selon moi.
[/quote]
Le canon était cité à titre d'exemple, juste pour évoquer la complexité de la construction, la "cérébralité" de Bach.
Pour moi, la Set Theory est tout à fait défendable dans la mesure où elle reste un outil d'analyse de la musique atonale puisque cette théorie a été développé à cette fin. L'outil est d'autant plus en adéquation avec l'esprit de la musique qu'elle analyse que les compositions ainsi analysées sont souvent le fait de compositeurs qui utilisaient les mathématiques pour composer.
En revanche - et au risque de déborder sur le topic voisin proposant d'analyser un quatuor de Beethoven auquel je répond de facto -, je doute vraiment que l'utilisation exclusive de la Set Theory puisse expliquer la musique tonale, quelle qu'elle soit. Je ne dis pas qu'elle n'a pas d'intérêt mais qu'elle ne peut être que complémentaire et marginale parce qu'elle passera forcément à côté de l'essentiel.
Les outils traditionnels dont on dispose (analyse par fonction et par degré, ainsi que l'analyse schenkérienne qui lui est complémentaire et qu'on utilise hélas trop peu en France, le rapprochement effectué avec les formes en vigueur à l'époque comme la forme sonate, etc...) sont pour moi plus à même d'expliquer la musique tonale puisque les compositeurs eux-même écrivaient en les ayant à l'esprit. Ce type d'analyse permet de rendre limpide une œuvre de Mozart ou de Beethoven, ainsi que les raisons qui ont présidé à certains choix.
Par exemple, la modulation inhabituelle à la sous-dominante pour retourner au ton principal lors de la ré-exposition dans la sonate pour piano K.545 de Mozart, permettant ainsi de créer une sorte d'effet miroir entre l'exposition et la ré-exposition, est un choix compositionnel plutôt ingénieux que seule une connaissance de la forme et l'analyse traditionnelle permettent à mon sens de mettre en valeur, alors que c'est de la combinatoire!
NB: la pièce de Sciarrino est un peu ennuyeuse à l'écoute, mais je la trouve intéressante du strict point de vue musical - Compositeur .org - Forum des Compositeurs : Musique et Composition
YuHirà a écrit :Pour moi, la Set Theory est tout à fait défendable dans la mesure où elle reste un outil d'analyse de la musique atonale puisque cette théorie a été développé à cette fin. L'outil est d'autant plus en adéquation avec l'esprit de la musique qu'elle analyse que les compositions ainsi analysées sont souvent le fait de compositeurs qui utilisaient les mathématiques pour composer.
En revanche, je doute vraiment que l'utilisation exclusive de la Set Theory puisse expliquer la musique tonale, quelle qu'elle soit. Je ne dis pas qu'elle n'a pas d'intérêt mais qu'elle ne peut être que complémentaire et marginale parce qu'elle passera forcément à côté de l'essentiel.
Les outils traditionnels dont on dispose (analyse par fonction et par degré, ainsi que l'analyse schenkérienne qui lui est complémentaire et qu'on utilise hélas trop peu en France, le rapprochement effectué avec les formes en vigueur à l'époque comme la forme sonate, etc...) sont pour moi plus à même d'expliquer la musique tonale puisque les compositeurs eux-même écrivaient en les ayant à l'esprit. Ce type d'analyse permet de rendre limpide une œuvre de Mozart ou de Beethoven, ainsi que les raisons qui ont présidé à certains choix.
Par exemple, la modulation inhabituelle à la sous-dominante pour retourner au ton principal lors de la ré-exposition dans la sonate pour piano K.545 de Mozart, permettant ainsi de créer une sorte d'effet miroir entre l'exposition et la ré-exposition, est un choix compositionnel plutôt ingénieux que seule une connaissance de la forme et l'analyse traditionnelle permettent à mon sens de mettre en valeur, alors que c'est de la combinatoire!
Je suis totalement d'accord avec toi. Si Allen Forte a été très intéressé par les théories de Schenker, la Set Theory est destinée à analyser la structure de la musique atonale. Concernant la musique tonale, elle n'est qu'anecdotique. Mais elle se peut se révéler intéressante en complément, notamment en effectuant des segmentations et des imbrications dans une représentation circulaire. On voit immédiatement des relations internes mais sans plus. - Compositeur .org - Forum des Compositeurs : Musique et Composition
YuHirà a écrit :.../...ainsi que l'analyse schenkérienne qui lui est complémentaire et qu'on utilise hélas trop peu en France, le rapprochement effectué avec les formes en vigueur à l'époque comme la forme sonate, etc...) sont pour moi plus à même d'expliquer la musique tonale puisque les compositeurs eux-même écrivaient en les ayant à l'esprit. Ce type d'analyse permet de rendre limpide une œuvre de Mozart ou de Beethoven, ainsi que les raisons qui ont présidé à certains choix.
Ca fait plaisir de lire cela ! On se sent moins seul !
En France... - Compositeur .org - Forum des Compositeurs : Musique et Composition
modiel a écrit :Ya quand même un défaut dans ce courant, que n'ont pas les autres courant de la musique... Impossible d'écrire quoi que ce soit de joyeux.. On ne peut écrire que des musiques tourmentées ou torturées..
je ne sais pas vous, mais moi, à force d'écrire que des trucs comme ça, j'en deviendrais dépressif
Eh oui, les psychiatres affirment bien que la musique contemporaine (c-à-d atonale, dissonnante etc...) a une forte propension à rendre dépressif, fou, voire suicidaire. J'ai hélas été récemment témoin de cette triste succession d'évènements chez un proche. Dommage car à 29 ans c'était déjà un excellent pianiste de haut niveau. - Compositeur .org - Forum des Compositeurs : Musique et Composition
modiel a écrit :Ya quand même un défaut dans ce courant, que n'ont pas les autres courant de la musique... Impossible d'écrire quoi que ce soit de joyeux.. On ne peut écrire que des musiques tourmentées ou torturées..
je ne sais pas vous, mais moi, à force d'écrire que des trucs comme ça, j'en deviendrais dépressif
Eh oui, les psychiatres affirment bien que la musique contemporaine (c-à-d atonale, dissonnante etc...) a une forte propension à rendre dépressif, fou, voire suicidaire. J'ai hélas été récemment témoin de cette triste succession d'évènements chez un proche. Dommage car à 29 ans c'était déjà un excellent pianiste de haut niveau.
Ah bon et quelles études le prouvent?
Honnètement je doute fortement que la musique puisse être mise en cause pour une dépression ou un suicide c'est assez délirant même je trouve. On croirait entendre un évangéliste qui parle de metal. - Compositeur .org - Forum des Compositeurs : Musique et Composition
"Eh oui, les psychiatres affirment bien que la musique contemporaine (c-à-d atonale, dissonnante etc...) a une forte propension à rendre dépressif, fou, voire suicidaire."
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Comme quoi, il ne faut pas plus laisser les problèmes mentaux aux psychiatres que la guerre aux militaires...
Plus sérieusement, je doute fort de cette affirmation.
D'ailleurs, réduire la musique contemporaine à l'atonalité et aux dissonances me semble aussi très réducteur. Ou alors, il redéfinir le mot "contemporain". - Compositeur .org - Forum des Compositeurs : Musique et Composition
Patrick a écrit :D'ailleurs, réduire la musique contemporaine à l'atonalité et aux dissonances me semble aussi très réducteur. Ou alors, il redéfinir le mot "contemporain".
Il n'y a qu'à voir les compositeurs postmodernes.... qui font partis des contemporains! - Compositeur .org - Forum des Compositeurs : Musique et Composition
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